Chambre régionale des Comptes : le Conseil général doit faire du social
Le dernier rapport de la Chambre régionale des Comptes sur le budget prévisionnel 2014 du département est plus favorable que les précédents. Il est toutefois alarmiste sur la gestion de la masse salariale et invite le département à se pencher davantage sur le social.
Daniel Zaidani, à la fois encouragé et recadré par la CRC (ici en avril 2014 lors de la présentation du budget prévisionnel)
L’un des rapports les moins sévères de l’histoire des relations entre le Conseil général et l’institution comptable ! Et pour cause : son budget prévisionnel 2014, issu d’un budget excédentaire de 46,6 millions d’euros en 2013, ne devait pas faire l’objet d’une saisine du préfet.
Ce fut pourtant le cas, le représentant de l’Etat ayant malgré tout interpellé la chambre pour non adoption du budget annexe du Service d’Incendie et Secours dans les temps. Un contretemps vraisemblablement dû au passage du SIS à un SDIS propre à un département.
Cela aura de toute manière permis aux experts en comptabilité et gestion d’éplucher les différents postes de la comptabilité analytique et du budget prévisionnel, et de livrer leur mouture publiée ce 14 août 2014. Avec une bonne surprise, « il y a concordance entre les écritures du compte administratif et du compte de gestion », ce qui implique que les montants inscrits peuvent être maintenus.
Mais le rapport n’en est pas moins alarmiste. Et relève un paradoxe : tout en ayant pris des dispositions pour ne plus procéder à l’engagement de financements sans autorisation préalable « dans une volonté d’apporter une meilleure évaluation des dépenses », le Conseil général accroît ses effectifs de 795 agents, sans qu’une recette (en dehors des contrats aidés de l’Etat) ne vienne compenser ce surcoût de 10% de la masse salariale totale.
« Il n’y a pas eu de remise à plat des salaires »
De plus, le département avait indiqué à la Chambre des Comptes que la mise en place de la majoration de traitement (l’indexation, 15% en 2014) des fonctionnaires serait conditionnée à un toilettage de la rémunération déjà perçue, considérée comme déjà élevée. Or, la Chambre dit « regretter que cette remise à plat n’ait pas été effectuée par le Conseil général ».
D’autre part, elle relève « plusieurs erreurs ou omissions affectant la sincérité du budget primitif 2014 », comme des engagements vis à vis d’autres collectivités de l’île qui n’ont pas été inscrites dans la totalité des sommes dues.
Le Syndicat Intercommunal d’Eau et d’Assainissement (SIEAM) est entre autre la victime du désistement du Conseil général sur sa participation due au titre du 13ème Contrat de projet, plombant la gestion dudit syndicat. Sur ce dossier, le département évoque une dette du SIEAM de 3,4 millions d’euros.
« Un département au budget encore fragile »
Au regard des sommes dues, la Chambre régionale des Comptes propose au département de diminuer à la baisse son évaluation en capacité d’investissement, « une situation qui démontre le caractère encore très fragile des finances du département » qui doit « gérer de manière très rigoureuse sa masse salariale ».
Et surtout, axer ses actions dans ce qui est « une des compétence principale du Département, l’action sociale et médico-sociale ». Une situation sociale « hors norme » dans l’ensemble des départements d’Outre-mer, à laquelle Mayotte ne fait pas exception, qui demanderait un budget de 60% (moyenne des autres départements) dans le social. S’il a été augmenté à Mayotte en 2014, c’est essentiellement lié à la montée en charge du RSA, et il n’est encore que de 23%.
En cas de nouvelles recettes, la chambre, qui a souvent l’image de grande moralisatrice auprès des élus, appelle donc à les affecter sur l’Aide sociale à l’Enfance.
En résumé, on peut dire que tout en se dotant des outils nécessaires à une bonne gestion, le Conseil général de Mayotte prend facilement le biais de vouloir répondre au chômage par des recrutements. Ce qui finit par handicaper la collectivité qui ne peut plus à terme investir ou pratiquer une réelle politique sociale.
Anne Perzo-Lafond Le Journal de Mayotte