« Il y a des journées entières où il n’y a pas eu de kwassas arrivés »
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L’opération Wuambushu, crises de l’eau, diplomatique, deuxième prison, loi Mayotte, plusieurs sujets ont été abordés à Combani, ce samedi après-midi. En visite pendant deux jours, les ministres Gérald Darmanin et Jean-François Carenco tentent de rassurer la population mahoraise et défendre leur bilan.
Un premier bilan de l’opération
Une séquence pour évoquer le déroulement de l’opération Wuambushu est prévue ce dimanche, avec la démolition de cases en tôle aux Badamiers, à Dzaoudzi. Cependant, ce samedi, il était difficile pour le ministre de l’Intérieur et des Outre-mer de ne pas l’aborder alors qu’il est sur le territoire mahorais pour la première fois depuis son commencement. « Elle a connu des difficultés techniques, juridiques avec d’innombrables recours, diplomatiques », a reconnu Gérald Darmanin, lors d’un point presse sur la place d’armes du Régiment de service militaire adapté de Mayotte, à Combani. « Et puis je pense que la force de la volonté politique l’a emportée. Ce qui compte le plus aujourd’hui, c’est le choc psychologique. C’est de dire aux Mahorais que nous les aimons, que nous mettons énormément de moyens, qu’on ne va pas reculer. » Sur le volet des chefs des bandes identifiés sur l’île, le ministre se targue que « 47 sur 57 ont été arrêtés ». Alors que du côté de l’immigration, toujours selon lui, « il y a des journées entières où il n’y a pas eu de kwassas arrivés à Mayotte ».
Vers un Shikandra 2
Outre le prolongement d’un mois de l’opération en cours, le ministre a annoncé « une nouvelle formule » à la rentrée centrée davantage sur « l’économie informelle » en s’attaquant davantage « aux marchands de sommeil, à l’agriculture et la pêche illégales ». Cette « sorte de Shikandra 2 [opération de lutte contre l’immigration en vigueur depuis 2019] sera proposée au président de la République au cours de l’été ».
Relations avec les Comores
C’était la mauvaise nouvelle du début de l’opération. Au premier jour de celle-ci, le 24 avril, les Comores ont fermé le port d’Anjouan aux personnes expulsées du territoire mahorais. Trois semaines de négociations ont été nécessaires pour que les expulsions reviennent à la normale. Combien de personnes sont concernées depuis ? Le numéro 3 du gouvernement s’est bien gardé de le dire, comme il a été convenu avec les autorités des autres îles de l’archipel. En outre, il dit avoir noué de bonnes relations avec son vis-à-vis comorien.
Il évoque des départs plus compliqués à mettre en œuvre pour les Africains des Grands lacs. Gérald Darmanin prévoit, après les vacances estivales, compte pour cela se muer en « ambassadeur de l’Intérieur » en allant au Burundi, Rwanda, Tanzanie et Mozambique pour « négocier des accords de réadmission » de leurs ressortissants.
Crise de l’eau
Au bord de la retenue collinaire de Combani, en fin d’après-midi, les deux ministres ont promis de « régler la crise » en deux temps. Pour la sécheresse actuelle, il n’y aura pas de miracles pour l’île qui est passée à quatre coupures d’eau par semaine. « Avec deux osmoseurs produisant 1.300 m2 d’ici la fin de l’année et des forages, l’appel au peuple pour moins gaspiller, ça pourrait le faire », prévient Jean-François Carenco, le ministre délégué aux Outre-mer. Pour le reste, il faudra se contenter de bouteilles d’eau dont le prix sera bloqué le 15 juillet. Un approvisionnement depuis l’île Maurice (pour laquelle la réglementation s’est assouplie) et La Réunion est prévu pour écarter un risque de pénurie dans les magasins.
Pour les gros investissements promis en revanche, il faudra attendre. Aucune précision pour la retenue collinaire d’Ourouvéni n’a été donnée. Et pour la nouvelle usine de dessalement de 10.000 mètres cubes, si elle a été avancée à fin 2024 (c’était 2025 ou 2026 initialement), Mayotte se contentera de l’actuelle qui devrait atteindre ses 4.700m2 par jour espérés « en décembre », a prédit le ministre délégué. De son côté, le syndicat Les Eaux de Mayotte s’est engagé à faire la chasse aux fuites sur son réseau vieillissant.
Relation avec les élus
Le point presse au RSMA était précédé normalement d’un temps d’échanges avec les élus. Sauf que celui-ci a été très court, puisqu’hormis les parlementaires Estelle Youssouffa, Thani Mohamed-Soilihi et le nouveau maire de Tsingoni, Issilamou Hamada, il n’y en avait pas d’autres. La première se dit « attentive » avec les promesses du gouvernement, tandis que le sénateur se fait l’avocat de l’État. « Je pense que l’apport majeur, c’est un renversement de la table. On ne peut pas en quelques mois ou semaines faire le travail que l’on n’a pas fait en deux décennies », argue l’élu du même parti qu’Emmanuel Macron, Renaissance (ex-La République en marche).
Toujours concernant les élus du territoire, ils sauront dans quelques jours si leur lobbying de ces derniers mois a payé dans la future loi Mayotte. « Le ministre délégué va présenter le dossier, que je soutiens fortement, au comité interministériel prévu le 6 juillet », prévient Gérald Darmanin.
Soutien des collectifs
Selon l’équipe du ministre, « 200 à 300 » personnes étaient présentes sur la place de la République, à Mamoudzou, ce samedi midi. Les collectifs locaux voulaient assurer l’État de leur soutien. « Pour une fois qu’une manifestation est positive, je ne vais pas la bouder », déclare Gérald Darmanin, qui dit avoir entendu le vote massif pour Marine Le Pen en 2022 « comme un cri ».
La deuxième prison
Avec un taux d’occupation de 240%, la prison de Majicavo-Koropa a plus qu’atteint ses limites alors que l’opération Wuambushu est loin d’être terminée. Les agents de l’administration pénitentiaire ont fait grève il y a plusieurs semaines pour dénoncer cette situation qui risque toutefois de perdurer. « Pas de terrain pour l’instant trouvé. Je fais un appel à la population et aux élus », reconnaît le ministre Darmanin au sujet de la deuxième prison promis il y a plus d’un an par Éric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice. Comme pour nombre d’établissements pénitentiaires, il est vrai qu’on trouve peu d’élus volontaires.
Et si une extension est vivement souhaitée par les syndicats de surveillants pour répondre à l’urgence, l’idée a du mal à faire son chemin. « Pour l’instant, il me paraît plus raisonnable de les amener en métropole et à La Réunion [ce que l’administration pénitentiaire fait déjà chaque semaine] », estime le ministre.
Celui-ci a annoncé en même temps la construction d’un deuxième centre de rétention administrative, en Grande-Terre cette affaire, qui sera tout aussi concerné par des problèmes fonciers.
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